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Allons ! zInfluents de la Patrie !

Pour saluer la France et, en passant, la polémique autour des BlogueurZinfluents, une petite chansonnette pour l’occasion:

Allons ! zInfluents de la Patrie !
Le jour de gloire est arrivé !
Contre nous de l’imprimerie,
L’établishment pensant est levé ! (Bis)
Entendez-vous dans les journaux
Mugir ces féroces jaloux ?
Ils viennent jusque dans vos blogs
Égorger vos posts, vos conversations
[refrain]
Aux larmes, citoyens ! Etc

Cette polémique dite des BlogueurZinfluents a commencé comme la plupart des polémiques sur la blogosphère: un simple billet. Attaque directe, réponses immédiates, escalades et avalanches de commentaires destructifs.

La guerre de la toile
On se rappelle, début juillet, Guy Birenbaum (journaliste, et sur son blogue, faut-il le préciser) s’en prend à un blogueur de longue date (Embruns, qui n’est pas zournaliste, lui et qui depuis demande l’asile politique au Canada ;-).

Birenbaum, du coup en profite pour dénoncer avec virulence tous les «Blogueurs Zinfluents», ces «caïds» de la blogosphère. (voir le compte rendu de 20minutes.fr). (MàJ : et aussi la chronologie de François Guillot).

Tempête qui aurait été bien classique si ce n’avait été de la fermeture volontaire d’un de ses blogueurZinfluents, celui de Versac, épuisé par une telle polémique …

«Avant il y avait deux sphères distinctes: une sphère sociale, celle des blogs, où tout le monde était égal; et de l’autre côté, la sphère médiatique. Ces deux sphères sont en train de se mélanger: les médias se mettent aux blogs alors que certains blogueurs se professionnalisent.» déclare Nicolas Vanbremeersch, de Versac. (source20minutes.fr).

Sa déclaration tombe sous le sens, mais, j’insiste, il faut préciser comment elle fait sens: dans la blogosphère, tous sont égaux, car il n’y a aucune limite de place. Chacun peut bloguer et si vous n’aimez pas, poursuivez votre chemin.

Dans les médias, c’est une autre histoire, la limite économique impose un contingent limité, hiérarchique, compétitif, ou, en quelque sorte, c’est un jeu à somme nulle, c’est-à-dire que s’il y a un gagnant, il y a nécessairement un perdant.

Le retour du Je dis
Certains y voient un mouvement de plaques tectoniques (Fred Cavazza : « le passage de l’âge de pierre à l’âge de fer« ) ou un simple guerre de blogueurs contre journalistes (Régis Soubrouillard, Marianne2). Le premier a un bon flair, le second n’a pas tort. L’un regarde vers l’avant, l’autre vers l’arrière. L’un y voit une mutation, l’autre un éternel recommencement.

N’en déplaise aux bonnes âmes, la blogosphère évolue indépendamment des volontés de tous. Que « l’autorité d’influence » se partage avec les blogueurs n’est que l’ordre des choses: pour « influencer » il faut communiquer. Et communiquer n’est plus l’apanage d’une aristocratie « légitime ».

J’écrivais dans le livre « Pourquoi Bloguer » que influencer, c’est un rayonnement moral et intellectuel, une conséquence du leadership, mais donnée comme attribut par ceux qui le décident. L’influence, à ne pas mélanger avec la manipulation, est un art qui se cultive et un pouvoir qui se mérite.

Dans la blogosphère, ce que les aristocrates n’aiment pas, c’est que la notoriété se bâti à la force des poignets: personne n’est désigné. Chacun doit faire sa place. La culture populaire (la culture du grand nombre, horreur) a fait percoler certains au sommet.

L’embruns contre attaque
Il faut comprendre ici que la vision culturelle de l’élite, de tout temps, se restreint à ce qu’ils ont décidé de désigner comme culture. Il est tout à fait normal que la montée des blogueurs soit un engouement populaire, du bas vers le haut, puisqu’il est le fait d’individus issus de la culture populaire.

Et ces changements changent la donne, rééquilibrent les pouvoirs et redistribuent les cartes. Que Laurent Gloaguen, du blog Embruns, soit un BlogueuZinfluent n’est que le résultat statistique de préférences populaires. (Et encore, il faut relativiser à l’aune du nombre absolu. On est loin du Monde.)

Mais il y a quelque chose qui existe maintenant qui ne pouvait pas exister avant: chacun peut monter son média. Ou pour le prendre négativement, vous pouvez ignorer qui vous voulez, car aucun blogueur ne prend la place d’un autre. Contrairement aux journalistes.

Les journalistes sont des vendeurs de tulipes
Que les blogueurs soient des journalistes, c’est un débat déjà ancien et enterré. Ce sont certes des chroniqueurs, une société de chroniqueurs, comme je l’écrivais il y a déjà quelques années, mais ils empruntent une caractéristique qui n’appartenait qu’aux journalistes avant: la possibilité de créer du buzz.

Ce que le philosophe Peter Sloterdijk nomme joliment : « les journalistes sont des vendeurs de tulipes ».

L’excellent blogue « Crise dans les médias » a repéré quelques aphorismes qu’il a dit à propos de ça; délicieux:

« Ceux qui ont passé leur jeunesse en grands consommateurs de la publicité sont capables de s’immuniser contre cette invasion permanente »

« c’est la raison pourquoi cette subculture, la subculture de l’attitude cool appartient aujourd’hui au courant des Lumières »

« Le journaliste est le prototype de l’homme porteur d’un message zéro… »

« Le journaliste est précisément celui qui se déclare prêt à transporter une information, mais ce n’est pas la sienne… »

« Ce sont des fonctionnaires de l’information ou des câbles vivants… La démocratie c’est sous un certain angle de vue le retour du tribalisme à l’échelle de l’État nation… »

« Le gossip c’est une sorte de totalitarisme communicatif qui submerge tout l’espace public par ce qu’on a entendu dire… »

À méditer

Martin Lessard
Conférencier, consultant en stratégie web et réseaux sociaux, chargé de cours. Nommé un des 8 incontournables du Montréal 2.0 (La Presse, 2010). Je tiens ce carnet depuis 2004.
http://zeroseconde.com

5 thoughts on “Allons ! zInfluents de la Patrie !

  1. Connait vaguement cette polémique des BlogueurZinfluents avec l’arrêt de Versac, son pseudonyme.

    J’apprécie les BlogueurZintelligents avec une pointe d’humour qu’ils soient influents ou pas. C’est une denrée assez rare quand on place le niveau haut avec un raisonnement cohérent. Maintenant tout ces journalistes et blogueurs pissent du texte chaque jour et difficile de conserver la qualité et justesse des propos. On tombe vite dans le joli, l’effet de style et les amalgames.
    Je dois dire que je suis impressionné par la vitalité de la biosphère mondiale. Tout ces personnes qui écrivent chaque jour! Combien ça représente de millions de ligne ? Et dans tout cela, il y a surement noyé un texte génial, une découverte quotidienne majeure. C’est une immense chasse au trésor contemporaine. Sans compter sur le net les grands auteurs du passé qu’on peut retrouver en .pdf

  2. Éric, j’imagine parce que l’on pense que les blogueurs on du crédit, de l’importance.

    Je ne crois pas qu’il faille rejeter ce mot, parce que pompeux, mais il faut tout de même savoir pourquoi, ou sur quelle base, ou sur quelle échelle on est influent.

    Ça me semble de la jalousie, tout ça. On est tous influent pour quelqu’un…

  3. Paul2canada, il ne faut pas trop s’en faire sur la « quantité » de chose écrites. Ce ne sont que des « traces » de ce que l’on se dit, tous les jours, partout, tout le temps. Si on enregistrait tout ce que l’on dit, on aurait le même niveau de fouillis.

    Et on aurait autant de misère à chercher l’aiguille…

    Et même avant internet, ceux qui publiaient du « sérieux », il y en avait un sacré couche de pourri…

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