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TV 2.0: un nouveau format de 13 heures?

Depuis vendredi dernier la nouvelle série «House of Cards» est disponible sur Netflix. Mais il ne s’agit pas ici de parler de scénario ou de réalisation (si vous voulez savoir, oui c’est bon): cette série ouvre une perspective intéressante dans le monde de la télé à l’ère d’Internet. Deux en fait.

1- La série a été commandée par et conçue pour Netflix (un distributeur) et non par/pour un grand réseau de télévision (un télédiffuseur). Une série de 100 millions de dollars. Dans la chaîne de valeur, ce sont les télédiffuseurs, normalement, qui gèrent la « grille horaire ». Mais avec la vidéo-sur-demande, qui veut encore d’une grille horaire? Entre en scène, alors, le distributeur.
2- Les 13 épisodes sont disponibles d’un seul coup. Oui en même temps, dès le jour 1 (dans sa première fenêtre, comme on dit). Les nouvelles habitudes d’écoutent développées dans les dernières années, surtout en un temps d’abondance de bonnes séries série de télévision, ont amené les gens à écouter en rafales celles qu’ils ont manquées.

Fin des rendez-vous télévisuels pour les grandes téléséries? 

C’est la première série qui s’émancipe du rendez-vous hebdomadaire dès sa première diffusion. On s’est habitué dans la dernière décennie, avec les DVD et ensuite Tou.tv et Netflix à écouter en rafale les émissions qu’on a manquées.

Une nouvelle narration pourrait se mettre en place, plus proche du film, où il n’y a pas besoin de flashback au début de chaque émission pour nous rappeler ce qui s’est passé la semaine précédente ou avant la pub.

C’est d’ailleurs une série où les réalisateurs ont plus de contrôle, comme au cinéma. Avec les séries, c’était plus les scénaristes qui étaient en contrôle.

À quoi peut bien ressembler une série qui serait produite en sachant qu’on pourra l’écouter en rafale dès la première écoute?

House of cards ne pousse pas outre mesure dans cette direction (la série été vendu à des chaînes télé traditionnelles comme seconde fenêtre de diffusion, donc je crois que le formatage a joué encore un rôle). Mais maintenant que la brèche en vidéo-sur-demande est ouverte, il n’y a plus de raison pour que les épisodes restent formatées en morceau d’1 heure nécessairement, ni même d’égale longueur.

Second écran vs longue traîne

Il y a donc clairement une scission en télévision en perspective, où certaines émissions continueront à être diffusées en direct — et seront arrimées aux réseaux sociaux avec le second écran– et d’autres qui seront conçus et consommés sur demande — et vivront dans la longue traine.


La saison 2 (13 autres épisodes) ont été déjà commandée. On verra s’ils vont en profiter davantage du « nouveau format de 13 heures». Peut-être pas cette fois, mais éventuellement, ça se fera d’une façon ou d’une autre.

Post-Scriptum du 11 mars 2013:
Jean Tourangeau m’a fait suivre des statistiques sur la consommation de ces épisodes sur le territoire canadien:

«Parmi les abonnés canadiens ayant visionné House of cards, quelque 30
% avaient déjà consommé les 13 épisodes de la première saison au
moment de l’enquête, la semaine dernière.

  • Environ 34 % en avaient vu entre 4 et 12, et 35 % n’en avaient pas vu plus de 3.
  • La moyenne du nombre d’épisodes regardés était de 7, ce qui représente 2 épisodes par semaine pour l’abonné moyen du service Netflix.
  • Les abonnés les plus susceptibles de regarder les épisodes les uns après les autres sont les 18-34 ans. Environ 40 % d’entre eux sont déjà passés à travers les 13 épisodes.

L’étude a été réalisée la semaine dernière auprès de 1200 abonnés de
Netflix par la firme Solutions Research Group Consultants.»

Pour mémoire, j’ai écouté les 13 épisodes dans les 7 premiers jours où ils étaient disponibles.

À lire aussi sur Zéro Seconde:

TV 2.0: Vers une première fenêtre en ligne? (suite de ce présent billet)
TV 2.0 : Sous les RT, la plage horaire?
TV 2.0: Google TV

Martin Lessard
Conférencier, consultant en stratégie web et réseaux sociaux, chargé de cours. Nommé un des 8 incontournables du Montréal 2.0 (La Presse, 2010). Je tiens ce carnet depuis 2004.
http://zeroseconde.com

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