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non-peer review

Un billet caustique de Marc-André a signaler à propos du filtrage collaboratif. Serions-nous arrivé à l’ère du nivellement par le milieu?

En parlant de Wikipedia il dit : « (…) celui qui a étudié la question plus à fond (dans une structure officielle ou non) aura beaucoup plus de difficulté à défendre sa position devant un jury de non-pairs, et ce, à répétition.« 


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J’avais écris précédemment : « La blogosphère est un vivier de théories profanes. Internet génère la construction et le partage d’une connaissance profane qui n’a pas reçu l’aval d’une institution légitimante. Un savoir émerge et elle se crée ses propres outils d’autolégitimation.« (source).

Wikipedia serait un bien meilleur exemple de territoire où la « masse » s’approprie la « connaissance ».

Ce vivier propose un monde où le savoir est confronté de facto à un « non-peer review ». La revue des non-pairs. N’importe quel quidam peut dire donner son point de vue. Je dis quidam car dans un monde de peer-review, il faut appartenir à l’institution ET être expert reconnu du domaine d’expertise pour avoir le droit de donner son point de vue. Le droit s’acquérait par la construction d’une légitimité académique (principalement).

Évidemment, ce dont parle Marc-André c’est que la compétence d’un spécialiste dans sa sphère de spécialité n’entraîne plus une déférence. Sur Wikipedia, par exemple, il devra la défendre à chaque fois son expertise pour convaincre qu’il a raison (il ne peut pas nécessairement se cacher derrière son diplôme). On arrive a des situations cocasses où l’expert peut perdre patience devant l’acharnement de quidams haut en gueule et leur laisser la place.

J’avais déjà signalé l’épisode où un wikipédiste insistait mordicus pour inscrire dans la bio d’ Umberto Eco un fait si anodin qu’il m’apparaissait odieux d’en parler sur une page de deux écrans de long. Le fait mérite sa place dans une note de bas de page dans une biographie posthume exhaustive de 1200 pages seulement, afin de bien noyer l’anecdote. Mais voilà, sur Wikipedia, la verrue s’y retrouve maintenant.

J’y vois deux notions à retenir : dans cet espace de non-peer review, avec la production du folk knowledge, il y aura retour évident de la rhétorique comme arme argumentative (avec ses avantages et ses inconvénients) et la reconnaissance que l’exercice de l’autorité cognitive sur Internet s’applique de façon différente. Ce dernier point m’intéresse particulièrement.

Nous sommes confronté dorénavant à s’adapter au fait que 99,99% de nos connaissances (actuels et à venir) proviendront de second-hand knowledge : nous connaîtrons les choses à travers les expériences des autres et non plus particulièrement à travers la nôtre (first-hand knowledge.)

PS: 23 août
Liens intéressants:
Peer and non-peer review de Andrew Odlyzko (Digital Technology Center)University of Minnesota.
More on blogging referee reports and hacking peer review de Sébastien Paquet.
Blogs, Science and Peer Review.

Billet original sur http://zeroseconde.com

ZEROSECONDE.COM (cc) 2004-2012 Martin Lessard

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Martin Lessard
Conférencier, consultant en stratégie web et réseaux sociaux, chargé de cours. Nommé un des 8 incontournables du Montréal 2.0 (La Presse, 2010). Je tiens ce carnet depuis 2004.
http://zeroseconde.com

5 thoughts on “non-peer review

  1. Il manque en effet aux « Wikipedia-like » un minimum de « contrôle ».
    Je pense en particulier qu’il serait plus pertinent d’opter pour une approche similaire à celle retenue dans le milieu du développement Open-Source.

    1. Un « nouveau » arrive, il propose des modifications aux « anciens ».
    2. Si ces modifications/ajouts/apports sont pertinents, alors les « anciens » (ceux qui ont le droit de modification) patcheront le contenu existant.
    3. Par la suite, à force de contributions pertinentes, le nouveau obtient ses lettres de noblesse et les anciens votent pour l’accepter dans leur cercle.

    Cette « procédure », ou cette manière de faire dans les communautés open source fonctionne très bien. La communauté open source existe depuis longtemps, et elle a déjà été confrontée à ce problème: Pouvoir faire la distinction entre les individus apportant réellement quelque chose et les beaux parleur.

    C’est une approche très pragmatique, mais très efficace qui tôt ou tard sera nécessaire dans le domaine de l’open knowledge.

  2. Hello…

    Hors internet, n’y a-t-il pas déjà une légère différence entre le principe de rédaction d’une encyclopédie ( on vulgarise ; il faut forcément omettre des choses ) et la publication dans une revue à « peer-review » ( on parle d’un domaine très pointu en s’adressant aux spécialistes ) ?

    Pour Ecco, j’avoue que la mention de son appartenance au collège de pataphysique me semble tout à fait notable, même si le développement qui suit apparaît un peu hors-sujet…

    Et quant au système de peer-review, j’en profite pour signaler un petit film éducatif commis par moi-même sur le sujet, qu’on peut voir ici :

    Misopoint : revues scientifiques

  3. Jérôme, l’approche du développement Open-Source est définitivement plus mature. Elle en fait une variante du peer-review dans le sens qu’il faut obtenir ses lettres de noblesse pour avoir droit au chapitre. Avec la différence notable qu’un commentaire ‘pertinent’ d’un ‘newbie’ peut être pris en considération (ce que le milieu institutionel classique ne fait pas). Mais effectivement, c’est un peer-review qui s’ouvre au non-peer.

    Wikipedia serait un monde de non-peer review pour le ‘open knowledge’. Je me demande s’il peut en être autrement. La connaissance approprié par la masse peut-il utiliser la méthode du open-source? Si oui, ce n’est plus la masse mais bien une ‘élite’ (les « anciens ») qui se la réapproprie. Non?

  4. Dvanw, je ne me cache pas que ce que je pense de la nomination au collège de Pataphysique de U.Eco. En fait, c’est vrai, c’est peut-être simplement une question (subjective) de goût personnel.

    Il me semble par contre, comme je l’ai fait ailleurs, que c’est moins pertinent (objectivement je crois) que le fait qu’il soit membre du Forum international de l’Unesco (1992), de l’Académie Universelle des Cultures de Paris (1992), de l’American Academy of Arts and Letters (1998) et qu’il ait été nommé sur le conseil de la bibliothèque d’Alexandrie (2003). Or la bio sur Wikipedia n’en parle pas…

    Quant à votre petit film éducatif, c’est un vé-ri-ta-ble petit bijou! Simple et clair. Bravo!

    J’ai un billet qui touche ce thème : l’hyperlien versus la citation

  5. ? Open Source et Open Knowledge ?

    Certes, il est clair que le comparaison entre ces deux univers, ces deux « processus » de création est féconde et séduisante.

    Attention toutefois à l’analogie car, quand on parle du processus de création « open-source », il y a au moins 2 distinctions fortes avec la « connaissance » telle qu’elle est construite dans les WiKi.

    – Qui dit « Open source » dit « logiciel » et « programmation » : donc un type de développement et de participation qui ne sont – par définition – pas accessibles à tout le monde, puisqu’il faut connaître les méthodes et outils de cette discipline. Qui ne maîtrise pas le « langage » de programmation utilisé ne peut « objectivement » pas participer au même titre que les autres. Les informaticiens qui y participent partagent non seulement la syntaxe et les méthodes de l’informatique mais aussi les « habitus » liés à leur métier, leur pratique.
    Or, dans le domaine de la connaissance « ouverte » telle qu’elle se formalise dans les WiKi, le langage utilisé est le bien langage « commun », accessible à tous. Donc c’est vraiment tout un chacun qui peut participer, et pas seulement les représentants d’un même métier technique – tous formés « à la même école ».

    – Qui dit « Open Source » dit « projet » : il y a échange, participation certes mais bien en vue d’une réalisation commune (le logiciel). Même s’il y a utilisation d’objets anciens (librairies et « environnements » logiciels) l’objectif est d’élaborer une réalisation nouvelle. C’est bien un processus de « création » qui est à l’oeuvre.
    Or, le projet des WiKi n’est pas la recherche, ni la création, de contenu nouveaux mais la « mise à disposition » de contenus au plus grand nombre. Il n’y a pas « création » en tant que tel mais un travail de synthèse et de diffusion.
    Le point commun des contributeurs du WiKi n’est pas un « projet » mais un « sujet » – celui sur lequel ils ont décidé d’intervenir.
    Des sujets sur lesquels le savoir est, en fait, « fabriqué » en d’autres lieux.

    On pourrait conclure en ajoutant que, dans le cas du logiciel, il existe un impératif objectif : il faut au final que « ça marche » !

    Finalement, ce que « Open source » et « open knowledge » ont en commun, c’est avant tout l’idéal de partage et de liberté qui les sous-tend.

    L' »Open Knowledge » est un grande aspiration, qui peut donner lieu à de grands projets.

    Le WiKi n’est qu’une première pierre, il reste encore à inventer, à expérimenter, ses méthodes et ses outils.

    Merci – en tout cas – à vous et à la qualité de vos réflexions.

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