Voici la deuxième balado de Triplex avec Philippe Marcoux, Gina Desjardins, Laurent Lasalle et moi-même.
«Si la technologie nous rend aujourd’hui plus efficaces au travail ou dans nos communications, est-ce qu’elle est pour autant essentielle à notre existence? Sommes-nous dépendants, voire accros, à nos divers appareils intelligents?»
L’émission est divisée en 8 sections :
00:00 – Introduction 01:34 – Sommes-nous dépendants des nouvelles technologies? 05:32 – Nouvelles technologies : les dangers et inconvénients 12:14 – La pression de suivre le rythme 17:04 – À quand les syndicats de l’esprit? 22:56 – Google nous rendrait-il stupide? 32:59 – Questions en rafale 34:14 – Fin
«Dépendance» est probablement un mot trop fort. C’est un mot valise dans lequel on peut mettre beaucoup de choses, et je crois que nous avons évité de tomber dans une définition «bon versus mauvais»
La médecine décrit la «dépendance» comme un «besoin de continuer à absorber certaines substances toxiques pour chasser le malaise dû au sevrage» (source Antidote), c’est à dire, la consommation de substance (ou l’usage) devenue nécessaire due à une pression physiologique malsaine. Une drogue, quoi.
Par extension, on dit alors que dépendance s’applique à ces trucs dont «on ne peut se passer». Dans le cadre de notre balado, on peut se demander si la techno et les nouveaux gadgets ne sont pas une dépendance. Il aurait été insensé d’y répondre par l’affirmative tout de go. La technologie apporte beaucoup de bienfaits et pas seulement des malaises. D’où la bifurcation à un moment donné dans la balado vers la notion de «risque».
La dépendance aux jeux ne date pas de l’arrivée du web, donc la technologie n’est pas une condition unique pour générer cette dépendance; il faut toutefois reconnaître que la technologie a créé ces jeux en ligne (les MEUPORG) qui peuvent toucher et affecter des gens –vous trouverez toujours un média pour nous le rappeler–. Donc oui, dans ce cas, il y a des risques. Mais la technologie est-elle la cause.
Une dose d’intraveineuses d’info
Moi, la question qui m’intéresse le plus concerne cette addiction à l’information devenue soudainement plus accessible, plus abondante.
Il me semble que cette «dépendance» à l’information touche deux choses:
(1) le web vient répondre et provoquer à la fois notre soif de savoir, notre curiosité infinie. L’accès à une infinité de documents ne fait qu’empirer notre soif comme l’eau salée que l’on boit en pensant étancher sa soif.
(2) une information quand elle est associée à nos réseaux sociaux me semble plus qu’une nouvelle, plus qu’une simple donnée, c’est le liant entre des gens, un liant qui donne sens à l’actualité, à la culture et à la vie.
Ce deuxième point est particulièrement fascinant. Il est à mon avis vraiment nouveau d’avoir si facilement et si abondamment accès à une information sociale qui vient remplir tous nos interstices de nos vies.
Le poids des infos, le choc du social
La raison de la dépendance pourrait être la peur de passer à côté de quelque chose, de ne pas être dans le coup. Les médias sociaux nous mettent au courant d’événements que nous sommes «en train de manquer»! En fait les médias sociaux ne sont que des traces que nous laissons dans nos moments libres (quand on est occupé, on n’est pas en train de tchatter). Les réseaux sociaux nous envoient en pleine face tout le temps libre (et seulement celui-ci) de toute notre communauté. Il y a de quoi être effondré en fait devant ce fait surtout quand on le compare à son propre agenda
Dans nos sociétés hyperproductives, le temps libre, c’est notre vie. Les réseaux sociaux donnent l’illusion que la vie (le temps libre) s’y trouve, comme une bouffée d’air frais, vitale au milieu de l’asphyxie productiviste.
Et comme les réseaux socionumériques reposent plutôt sur la notion plaisante de gratification (notoriété, échange) et nourrissante (apprentissage croisé et mutuel), on a tendance à être en manque quand on n’y a pas accès…
Quand on fini par comprendre que le sens minimal des échanges dans un réseau social comme Facebook c’est l’appartenance, alors on associe le manque d’échange de message à une perte de sens et de lien…
«Social media addiction»
Je vous donne quelques liens pour lire davantage sur le sujet qui intéresse de plus en plus les scientifiques et les académiciens (quoi que peut-être pas assez encore):
Social Network Addiction – A Scientific No Man’s Land? (Brain Blogger) où on s’interroge sur quelques cas où l’addiction à Facebook a fait perdre tout sens rationnel à des quelques personnes et où on se demande si en tant que drogue il n’y aurait pas aussi des effets positifs.
Facebook, Twitter Are Harder to Resist Than Cigarettes, Alcohol (Medical Daily) où une étude récente démontre qu’il serait possiblement plus facile de se priver d’alcool, de cigarette et de sexe que de Facebook. Je ne suis un peu dubitatif –et suspicieux, surtout à la veille du lancement en bourse de Facebook, j’ai tendance à voir de la manipulation médiatique pour rentre attractif les futures actions.
5 Signs of Social Network Addictions (GeekSugar) où on donne une idée des symptômes pour que vous puissiez vous auto-diagnostiquer et 1 ou 2 trucs pour que vous puissiez vous en sortir.
Réseaux sociaux : La maladie des temps modernes, un (trop) court extrait de « L’éloge de la vitesse » de Rafik Smati, qui va, dans ce texte, à mon avis, un peu trop vite pour dire que les réseaux sont addictifs, mais ça permet tout de même de prendre au sérieux la question.
Conférencier, consultant en stratégie web et réseaux sociaux, chargé de cours. Nommé un des 8 incontournables du Montréal 2.0 (La Presse, 2010). Je tiens ce carnet depuis 2004.
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